Elle ne peut se dissocier du passé historique de l'Aquitaine et, dès
l'Antiquité, on retrouve la trace de ce village à tradition
fortement viticole.
Depuis la conquête de la Gaule par Jules César et jusqu'en 471, les
Romains occupent la région et entreprennent de mettre en valeur les
terres fertiles proches de la Garonne, défrichent les coteaux et
plantent les premières vignes. De riches patriciens s'implantent
dans ce paysage accueillant, à côté de Sainte-Croix-du-Mont (on peut
encore admirer les vestiges d'une villa gallo-romaine qui aurait
appartenu à Ausone). Dans le village même, au lieu-dit le Peyrat, on
aurait également retrouvé les traces d'une sépulture gallo-romaine.
En 1153, l'Aquitaine va connaître un changement qui va marquer trois
siècles de son histoire : elle devient une province anglaise et ce,
jusqu'en 1455 ; Eléonore, fille du Duc d'Aquitaine, l'apporte en dot
au Roi d'Angleterre Henri II Plantagenet.
Sainte-Croix-du-Mont entre dans une période faste : tout d'abord, au
Xllème siècle, les anglais construisent une forteresse qui domine la
vallée, le Château de Tastes. A la même époque, en 1235, a également
lieu la construction d'une église : seul le porche roman remanié
subsiste.
Au XIIème siècle la Vicomtesse de Benauge achète au Sénéchal Henri
de Trubleville la paroisse de Sainte-Croix-du-Mont et près d'un
siècle plus tard, le Roi d'Angleterre concède à Gérard de Tastes et
à ses héritiers un droit de justice sur la paroisse.
Durant toute la domination anglaise, et malgré les incessants heurts
et escarmouches entre Français et Anglais, les bourgs viticoles
s'enrichissent, bénéficient d'une grande autonomie, et des largesses
des Rois. Les Anglais apprécient, plus que les français, ces vins de
nos coteaux et facilitent la circulation des marchandises : en 1316,
le Roi d'Angleterre abolit le droit qu'il prélevait sur la vente du
vin, et en 1342 il confirme par lettres royales ces privilèges et
accorde les exemptions pour "les vins du cru des territoires et
juridictions de Sainte-Croix-du-Mont". Place au commerce, aux
marchands de vin.
La navigation sur la Garonne bat son plein. Les gabares chargent les
barriques en partance pour l'Angleterre au port de
Sainte-Croix-du-Mont.
Mais la puissance anglaise tire à sa fin et en 1453, toute la région
est rendue au Roi de France. La stabilité politique renaît et le
bourg viticole prospère. Le Château de Tastes au début du XVIème
siècle appartient à François de Léon dont on retrouve la pierre
tombale à côté de l'église. A la fin du même siècle, Pierre de
Lancre, conseiller au Parlement de Bordeaux, devient propriétaire
d'un château et épouse une petite nièce de Michel Montaigne. Ce
personnage important aurait accueilli dans sa demeure Louis XIII et
le Cardinal Richelieu aurait célébré la messe dans la petite
chapelle creusée dans le banc d'huîtres fossilisées.
Les registres de cette époque attestent de l'activité
essentiellement viticole ; ainsi, on remarque une grande majorité de
vignerons, de laboureurs, de charpentiers de barriques, de
tonneliers.
Au XVllleme siècle, on retrouve la trace de bourgeois de Bordeaux
qui, séduits par les lieux, s'installent et font construire
d'élégantes demeures entourées de leurs vignobles. La révolution
française semble avoir épargné Sainte-Croix-du-Mont qui, pourtant,
abrite une figure révolutionnaire. En effet, en 1784, Gensonné, le
fameux girondin président de l'assemblée législative en 1792 et de
la convention un peu plus tard, achète une maison au pied des
coteaux.
Au XIXème siècle, le vignoble de Sainte-Croix-du-Mont est endommagé
par le phylloxéra. Le commerce du vin continue cependant, et le
trafic sur la Garonne se poursuit, le long des padouens, terres
alluviales non cultivées. Chalands et péniches s'arrêtent au Port du
Peyrat avant de s'acheminer vers le canal du Midi. Au début du
siècle, la commune s'organise et rachète le Château de Tastes. En
1909, les viticulteurs se regroupent et créent le Syndicat Viticole
de Sainte-Croix-du-Mont. Il assure depuis la défense, la maintenance
et la promotion de l'appellation.